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le petit Jacques et la pièce de monnaie

Publié le par HITOYUME

La fatalité s'en était mêlée. Il y avait une pièce, une toute petite pièce de monnaie sur le coin de la table. c'était une pièce d'un euro. On l'avait oubliée là, sans doute; mais quelle tentation !
Le petit Jacques, depuis un instant, lorgnait la petite pièce de monnaie du coin de l'oeil. Mais son père était là, très occupé à sa toilette. l'enfant l'observait. Papa vende placer le miroir contre la fenêtre. Ainsi se disposait-il à se raser, comme il le faisait chaque martin.
Or, Jacques sait bien qu'à ce moment-là son papa ne bouge plus de place, toute son attention étant retenue par la crainte de se couper.
La main du petit Jacques trembla lorsqu'elle se posa sur la petite pièce de monnaie. Il avait pourtant tout prévu. son père tournait le dos à la table. Donc, nul ne verrait, nul ne saurait jamais... Un epetite pièce d'un euro, ça peut se perdre, n'est-ce pas ? On croyait bien l'avoir posée ailleurs... On la retrouverait... Enfin, ce n'est pas une grosse perte. Qu'a-t-on aujourd'hui pour un euro ? Et l'on n'y pense bientôt plus.
Et voilà, c'est toujours la même histoire, banale eet sotte : le voleur, même le plus rusé, prévoit tout. Oui, tout sauf... ce qui le fait "pincer".
Et le petit Jacques n'avait pas prévu le danger qu'allait être pour lui le miroir devant lequel son papa se rasait. Un miroir c'est un espion... La main qui saisit... qui se referme... qui, rapidement, avec dextérité, fait passer la petite pièce de monnaie dans la poche de la culotte : tout ceci, le miroir en avait été le trop fidèle reflet.
L'involontaire témoin du délit ne broncha pas.
Ce ne fut pas long. Sous le prétexte d'aller jouer dans le jardin, où les roses s'entrouvraient sous la caresse des premiers rayons du soleil, le petit Jacques s'esquiva, courut jusque chez François, l'épicier dont le magasin est au bout de la rue, et d'où il fut bientôt de retour.
- Jacques !
L'enfant s'avança, un peu pâle, sans hâte, comme s'il hésitait.
Il le souleva doucement, l'assit sur ses genoux comme lorsqu'il n'était encore qu'un bébé, un tout menu bébé, puis, l'obligeant à tourner vers lui son visage anxieux, il lui dit d'une voix infiniment caressante :
- Regarde-moi, Jacques, mon chéri...
Ah ! pourquoi as-tu volé la pièce d'un  euro qui était restée là, sur la table ? Ne nie pas : tais-toi !...
Le caramel que tu viens d'acheter chez l'épicier avec cet argent, tu l'as encore dans la bouche...
Il n'est pas bon, n'est-ce pas ? Ecoute, mon mignon, tu viens de faire à ton papa qui t'aime de tout son coeur, à ce papa qui travaille surtout pour toi, un chagrin, un gros chagrin...
Oui, pourquoi l'as-tu volée, cette petite pièce de monnaie ?...
Ecoute ! J'ai beaucoup lutté, souffert et pleuré, parce que jamais je n'ai voulu que ma main tremble, que ma tête se baisse pour essayer de dissimuler le rouge de la honte qui monte au front soudain...
J'aurais pu être riche comme tant d'autres...
Je ne l'ai pas voulu, parce que, chaque fois, ce ne pouvait être qu'au prix de louches compromissions...
Je n'ai jamais voulu saluer le parvenu gonflé de vanité, ni flatter les puissants du jour ou m'incliner devant qui détenait les places, les honneurs, les sinécures...
Je suis pauvre. J'ai supporté toutes lesmisères, toutes sortes de privations, mais le pain dont je me suis nourri, il a toujours été à moi, bien à moi, parce que je n'ai jamais rien possédé qui n'ait été le fruit de mon travail...
J'ai donné parfois...
Je n'ai jamais rien reçu, n'ayant jamais rien demandé, rien sollicité...
Alors, j'ai connu tous les abandons. On disait que j'étais trop fier et l'on passait. mais je n'ai rien à craindre, ni les gendarmes, ni les policiers, ni qui que ce soit, parce que je ne dois rien à personne et que je n'ai fait de mal à quiconque...
Et cependant, moi aussi, j'aimerais bien les caramels et toutes les bonnes choses, et la vie facile, aisée, confortable, luxueuse. Je n'ai pas eu de chance, parce que j'ai toujours voulu rester trop scrupuleusement honnête. Je ne le regrette pas, n'ayant jamais désiré ce qui ne m'appartenait pas.
Alors, comprends-moi, mon petit Jacques : quand, tout à l'heure, dans le miroir, j'ai vu ton geste, j'ai remarqué que tu prenais la pztite pièce de monnaie, cette petite pièce de monnaie qui n'était pas à toi, et quand, de la fenêtre, je t'ai vu traverser le jardin en courant, regardant derrière toi pour vt'assurer que tu n'étais pas suivi... alors, oh ! alors, j'ai ressenti la douleur d'un pincement, là, au coeur, et j'ai pleuré... Oui, j'ai pleuré en murmurant : "Il n'est donc pas mon fils ?..."
Le petit Jacques s'étouffait; sa gorge se contractait affreusement; de grosses larmes inondaient ses beaux yeux bleus. Frisonnant, il se blottit en sanglotant contre la poitrine de son papa, et il balbutia :
- Papa... mon papa, est-ce que je peux le jeter, le... le caramel ?

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T
je pense que c' est une leçon qu' il n' oubliera pas de sitôt
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