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histoires a suivre

le prince des illusions (32)

Publié le par HITOYUME

le prince des illusions
32
(tiré des mémoires de Robert Houdin)

RESUME : le grand prestidigitateur français Robert Houdin vient d'être appelé à donner une représentation devant le Souverain Pontife. Ayant réussi à se procurer une réplique exacte d'une montre appartenant à l'un des cardinaux, il procède devant l'auguste assemblée à la destruction complète de cette montre, en affirmant qu'il la reconstituera après coup par un procédé connu de lui seul...

Déjà, les jardins, les serres, les appartements étaient encombrés de tout ce que Londres possédait de plus riche et de plus puissant. C'est tout au plus si l'on pouvait circuler librement. A chaque instant, un essaim formidable de marquises et de ladies me barrait le passage et me forçait à m'effacer pour ne pas m'exposer à froisser les plus éblouissantes toilettes que j'eusse jamais vues. Cela m'était assez difficile, car de quelque côté que je me jetasse complaisamment, je risquais fort de rencontrer le même inconvénient tant était nombreuse et compacte la réunion de Fulham.
A deux heures et demie, la Reine n'était pas encore arrivée, et l'on ignorait si l'on devait attendre Sa Majesté pour commencer la fête ou passer outre, lorsque des hurrahs frénétiques, dont l'air retentit à un mille de distance, annoncèrent qu'elle paraîtrait bientôt.
Aussitôt les cloches du village sonnèrent à triple volée; la musique entonna le God save the Queen et les plus jeune femmes vinrent former une double haie sur le passage de Sa Majesté.
Ces apprêts étaient à peine terminés que la Reine descendit de voiture, et, suivant une immense avenue tapissée de drap rouge et abritée par un dais aux riantes couleurs, elle se dirigea vers le salon.
Là, au milieu du cercle qu'avaient formé les dames patronnesses, Sa Majesté prit place, et le concert eut lieu.
Quant à moi, je me dirigeai vers mon théâtre, où l'on m'avait réservé une entrée particulière.
Lorsque le concert fut terminé, la foule envahit les places qui n'étaient pas réservées pour la famille royale et la cour. La Reine elle-même ne tarda pas à arriver, et aussitôt je reçus l'ordre de commencer.
Au lever du rideau, j'aperçus un spectacle à la fois magnifique et curieux.
Que l'on se figure une immense pelouse s'élevant devant moi en amphithéâtre, et comme disposée pour être le parterre de ma scène.
Au premier plan et tout près, la Reine, ayant à sa droite son Royal époux, était entourée de sa jeune et gracieuse famille. Un peu en arrière, les dames de la cour, assistées des dames patronnesses, formaient l'entourage de Sa Majesté. Puis, au second plan, à une distance respectueuse, étaient assises les femmes et les filles des nombreux souscripteurs. Quant aux messieurs, on les voyait symétriquement autour de cette vaste enceinte.
De l'endroit où je me trouvais, on eût dit une vaste prairie couverte de neige, sur laquelle s'étalaient les plus riches fleurs du printemps, et les habits noirs des spectateurs qui encadraient ce riant tableau, loin de l'obscurcir, en rehaussaient l'éclat.
Sur les côtés de la pelouse, des chênes séculaires apportaient leur frais ombrage à cette salle de spectacle improvisée.
Dans cette représentation unique en ma vie, le temps se passa pour moi avec une telle rapidité, que je fus tout étonné d'en être arrivé à présenter la dernière de mes expériences.

A  SUIVRE

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