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Huo Yuanjia

Publié le par HITOYUME

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Il fut le réformateur des arts martiaux traditionnels chinois en les faisant entrer dans la modernité, tout comme Jigoro Kano qui créa 20 ans plus tôt un nouveau sport martial au Japon. Plusieurs films lui furent consacrés : « Le champion de Tianjin », « La fureur de vaincre » et « Fist of legend ». Mais qui était ce fameux maître surnommé « face de citron » par les Occidentaux et empoisonné par les japonais ? Le maître Huo Yuanjia (1869 – 1910) est une véritable icône des arts martiaux chinois. Popularisé par Bruce Lee dans le célèbre film « La fureur de vaincre », il est né en 1869 dans la province du Hebei, au nord de la Chine et issu d’une lignée martiale dépositaire de la boxe secrète du Mizongquan (boxe de la trace perdue). Sa famille était spécialisée dans l’escorte des biens et des personnes. Son père, Huo Endi, régnait sur une entreprise prospère jusqu’à la révolte des Boxers, où le feu meurtrier des armes occidentales sonna le glas du kung fu de la Chine traditionnelle.

Suite à de nombreux défis relevés par la famille Huo, le jeune Yuanjia se tailla une solide réputation en faisant mordre la poussière à tous ceux qui osaient affronter la boxe familiale. En 1891, le clan Huo fut défié par un célèbre boxeur hunanais du nom de Du Xinwu (1869 – 1953). Alors âgé de 22 ans, Yuanjia défendit l’honneur du clan en affrontant Du, qui avait vaincu tous les meilleurs élèves de l’école. A la surprise générale, il infligea une sévère correction à l’imprudent mais, magnanime, il lui offrit l’hospitalité le temps de panser ses blessures. La morale martiale (wude) était très importante à cette époque car on redoutait les vengeances destructrices qui font perdre la face à un adversaire malheureux ! Il est à noter que le fameux Du Xinwu fut le créateur d’un style de kung fu appelé Ziran men (Ecole naturelle), basé sur l’art du combat avec un travail de jambes redoutable.

En 1895, on retrouve Huo Yuanjia dans la ville de Tianjin. Il fut appelé par un des plus riches commerçants de la ville pour mettre fin aux agissements de la pègre locale qui les rackettaient. Il n’eut aucun mal à mettre aux pas ces quelques malfrats qui firent l’expérience de sa redoutable technique martiale. Sa réputation ne fit que grandir. Il resta une année au service du riche commerçant Nong Jingsun, non sans avoir levé le voile du mystère qui entourait sa boxe, le Mizongquan, en enseignant celle-ci aux habitants de Tianjin. D’ailleurs, la ville actuelle lui consacre un musée relatant ses exploits et son histoire légendaire. Son premier disciple fut Liu Zhensheng, un boxeur du Shangdong qui exerçait lui aussi la profession de garde du corps. Bruce Lee incarna dans son film « La fureur de vaincre » ce disciple qui voulait venger la mort de son maître. Avant de créer son style, Bruce fut initié à la boxe de l’école Jingwu par le maître Siu Hongsan, le dépositaire de l’école à Hong Kong, un des dix tigres de Canton. Dans son livre « Le tao du jeet kune do », Bruce Lee écrit à propos de Huo Yuanjia : « Il fut le premier au cours des quatre derniers siècles de l’histoire du kung fu à établir un institut dans lequel les techniques de plusieurs écoles étaient enseignées. L’institut Jingwu rayonna à travers toute la Chine. Ce fut un célèbre patriote, prêt à chaque instant à défendre son pays . Plusieurs artistes martiaux japonais le défièrent. Il se rendit également en Sibérie où il tua plusieurs lutteurs russes avec un coup unique. Les étrangers l’appelaient le tigre à face jaune ! ».

Bruce Lee fut très influencé par l’aura de ce personnage très novateur pour l’époque. A tel point que le nom de son style, jeet kune do (le poing qui intercepte), est aussi le nom d’une forme de l’école Jingwu ! Après la défaite des Boxers, l’humiliation n’était pas épargnée aux fils du ciel, aussi en 1901 à Tianjin, un Russe du nom d’Igor Dadlov s’était proclamé « l’homme le plus fort du monde ». Il lançait un défi aux autochtones chinois afin de le rencontrer en combat singulier. Bon nombre de maîtres de wushu se résignèrent et préférèrent tourner les talons face à cette arrogance occidentale. Seul Huo Yuanjia releva le défi et accepta de rencontrer le combattant russe sur un ring. Celui-ci eut vent de la réputation du maître chinois ; aussi, il se défila et quitta la ville prestement. A la suite de cet événement, Huo reçu le surnom de « Tigre à face jaune ». Il fut à nouveau défié par un boxeur anglais à Shanghai, mais encore une fois le prétentieux s’esquiva discrètement. Fort de sa réputation toute grandissante et dans un élan patriotique, maître Huo créa en 1909 dans la concession nippone la célèbre école Jingwu (Ecole de la connaissance martiale). Cette école regroupait pour la première fois toutes les meilleures compétences dans le domaine du wushu, avec plusieurs maîtres qui coexistaient sous le même toit en dispensant leur art.

Pour l’époque, ceci était impensable ! Les maîtres de kung fu gardaient jalousement leur savoir et ne le divulguaient jamais en dehors de leur école ou de leur clan (jia). Huo Yuanjia sut sensibiliser la fibre patriotique de ses homologues en voulant redresser la Chine, en rayant à tout jamais la phrase infamante : « les Chinois, peuple malade de l’Asie ». Maître Huo contribua pour beaucoup à la modernisation de certains styles de kung fu. Dans son institut, on enseignait les disciplines occidentales comme la boxe anglaise et la musculation sous forme d’agrès de gymnastique, mais également la lutte ! Huo modernisera la technique, mais aussi les modes d’entraînement du wushu. Cette modification n’était pas du goût des japonais, qui auraient préféré voir le kung fu laissé au rang poussiéreux des disciplines passéistes. Peu de temps après, le maître fut invité à participer à un tournoi « amical » organisé par l’école du Budokan sise dans la rue Penglai. Pendant cette rencontre, le meilleur élève de Huo, Liu Zhensheng, mit à mal les combattants japonais, puis ce fut au tour du maître d’affronter le champion du B udokan : Saemon Yoshitaro. Après un court échange, le japonais utilisa un coup interdit et le maître chinois riposta en lui brisant le bras. Il s’en suivit une bousculade dans la plus grande confusion. Pour se faire pardonner, les hôtes japonais l’invitèrent à un dîner. S’apercevant que le maître était souffrant à la suite d’un refroidissement, ils lui proposèrent de le soigner dans la clinique japonaise du quartier Hongkou.

Il n’en ressortit jamais car il fut empoisonné par ses adversaires qui n’avaient pas supporté l’humiliation de la défaite. Le 14 septembre 1910, à l’âge de 41 ans, le Tigre jaune s’en est allé, mais son message ne commençait qu’à rayonner au travers des nombreuses écoles qui furent ouvertes dans toute l’Asie du Sud-Est. La boxe du maître est appelée Mizongquan (boxe de la trace perdue), ou aussi Yanqingquan du nom de celui qui la popularisa, l’un des 108 brigands du Mont Liangshanpo évoqué dans le célèbre roman « Au bord de l’eau ». On raconte d’ailleurs que le nom de cette boxe vient du fait que Yanqing, poursuivi par des soldats gouvernementaux, trouva la fuite à travers les montagnes en franchissant des cols sans laisser aucune trace sur le sol enneigé !

Plus tard, se rappelant de cet événement, on nomma l’école le Mizongquan (l’art d’escamoter ses traces). Le contenu de ce style est très dense. A l’origine, il y avait plus d’une centaine de formes avec et sans armes, allant des plus faciles et des plus élémentaires aux plus difficiles et aux plus avancées. Techniquement, le Mizongquan est caractérisé par des frappes du poing de haut en bas et de bas en haut, des swings, des écrasements, des parades, des extensions pendant que la main crochète, tire, saisit, coupe, pique par redressement ou par rabattement. Les coups ne sont presque jamais délivrés en ligne droite. En ce qui concerne les jambes, les déplacements sont complexes avec des enjambées latérales, des balayages et des crochetages nombreux. Les coups de pieds sont simples et rarement en lignes haute, ce qui est paradoxal pour une boxe du Nord (Beiquan). Quant aux mouvements du corps, ils se caractérisent par des sauts, des rotations et des demi-tours qui sont la marque nordiste du wushu. Après le décès suspect du maître Huo Yunjia, l’école Jingwu survécut à cet événement grâce à son fils Huo Dong Ge et son frère cadet Huo Yuanqing, qui prirent la suite des affaires, aidés dans cette lourde tâche par trois boxeurs expérimentés du nom de Chen Gongzhi, Lu Weichang et Yao Chanbo qui continuèrent à diffuser la boxe Mizongquan. Paradoxalement, plutôt que de sonner le glas de l’institut celui-ci se développa dans tout le sud-est asiatique, à tel point qu’à la fin de 1920, l’institut comptait presque 40 000 étudiants répartis dans une cinquantaine d’écoles. Rebaptisé « association sportive Jingwu » (Jingwu tiyu hui), ce centre culturel martial connut un nouvel essor en diffusant les arts de combat nationaux, mais aussi en proposant des disciplines sportives modernes telles que musculation, judo, boxe anglaise, kendo, ping-pong ainsi que de nombreuses démonstrations, des publications de différents ouvrages de propagande et même la réalisation d’un film publicitaire. L’école Jingwu devint le premier institut moderne de l’enseignement sportif dès 1912 en Chine.

 

Huo Yuanjia

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R
Merci pour ce récit !!! Un très gand maître, sans aucun doute !!
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J
un très beau récit très explicite avec beaucoup de détails et soigneusement raconter
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T
et bien voilà un homme qui n' aura jamais été battu, et qu' il valait mieux ne pas affronter.<br /> Dommage que de nos jours, ces &quot; maitres &quot; ne puissent pas s' occuper des malfrats !
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