esprit du judo

Voici une chronique de Patrick Roux. 7ème dan. Actuel entraîneur de l'équipe nationale russe.

PROJET DE PERFORMANCE (18)

UN CLIMAT DE CONFIANCE

Mais l'identification des signaux pour prendre la bonne décision repose aussi sur des mécanismes intellectuels et reste relative à notre état émotionnel. Décider en combat nécessite d'être capable de sélectionner rapidement dans son répertoire d'expériences et de solutions élaborées à travers le temps de la pratique et de l'entraînement. Cette faculté de tri et de sélection rapide s'affûte au quotidien...
Et vraisemblablement mieux dans un climat de confiance, quand l'encadrement laisse l'athlète devant la responsabilité de ses choix. La dimension qui représente le défi majeur de l'encadrement aujourd'hui ?
Comment créer les conditions de l'expérience, pour que les athlètes soient nourris par la richesse et la densité des exercices qui entraînent le traitement bio-informationnel ?
Comment décliner cette proposition dans tous les secteurs de l'entraînement, physique ou tactique, et de la préparation mentale ?
Les scenarii de kumi kata (saisi) et d'enchaînements, ou de combinaisons techniques, ou encore de liaisons debout-sol mille fois répétées, relèvent d'une élaboration d'un répertoire et donc d'une stratégie mise au point consciemment. L'instant de la riposte, du contre ou même de déclenchement de la projection est le plus souvent un automatisme, de même que la "réchappe" en salto qui permet à certains d'éviter de tomber sur le dos. Au fil du temps et de la pratique, on observe qu'un compromis se crée. Parfois, ça prend du temps, et les judoka "un peu trop cérébraux" ont du mal à se lâcher et à accepter qu'une part d'eux-mêmes, animale et oubliée, puisse piloter les évènements mieux que "soi-même". Inversement, d'autres, capables d'agir d'instinct avec une grande réactivité, seront à la peine pour gérer le combat, conserver un avantage, élaborer consciemment une tactique pour résoudre un problème face à une situation ou un problème récurrents. Mais quand un judoka atteint le bon équilibre entre ces deux modes (et cela relève d'une construction, d'un ratio personnel, individuel), eh bien, cela se voit. On ne parvient plus à le faire tomber. Il semble toujours en avance dans le cours de l'action, comme s'il devinait les intentions de l'adversaire. Et à la moindre faute ou à la moindre faille, vous vous retrouvez sur le dos. C'est vers cet horizon que les outils de la méthodologie moderne d'entraînement essaient de converger aujourd'hui.