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les enquetes de gustave cherchebien

une petite tache

Publié le par HITOYUME

les enquêtes de

Gustave CHERCHEBIEN

Comme d'habitude, Charles pose sa tête sur l'oreiller et s'endort paisiblement. Agnès se redresse sur son coude et lui lance un regard de mépris. N'ayant pas sommeil, elle prend une revue et elle lit.
Au bout d'un moment, elle allume la radio, sans crainte de réveiller son époux. On pourrait tirer un feu d'artifice sans perturber son sommeil. Agnés parle d'expérience, car cela c'est déjà produit aux vacances précédentes. Un soir de quatorze Juillet, Monsieur dormait déjà quand les fusées ont éclatées dans le ciel sur un fond musical et sonore élevé ! Le lendemain, en apprenant qu'il y avait eu un feu d'artifice, Charles lui avait reproché de ne pas l'avoir réveillé. Un comble !
Depuis des années, Charles et Agnés partagent les joies du foyer. Vite levé pour aller au travail, Charles ne rentre que pour mettre les pieds sous la table, regarder la télé et dormir. Agnés s'ennuierait à mourir si elle n'avait pas son travail à mi-temps. Au moins, comme ça, elle a des choses à raconter le soir avant que la table soit mise et la télé allumée.
Ainsi, leur vie s'écoulait, régulière et monotone, presque heureuse, scandée par les départs à la campagne les week-ends prolongés et les vacances. Le reste de l'année, ils vivent confinés au neuvième étage de leur tour, ne sortant que pour aller faire les courses, voir le cinéma ou aller chez des copains.
Ah si, il y eut un tout petit événement : une tache d'eau au plafond de la cuisine. Cela ne valait même pas la peine d'en parler. Cela ne valait même pas la peine de partir en retard pour le travail, pensa Charles, qui chargea sa femme d'aller voir le voisin du dessus pour régler ça.
C'est ainsi qu'Agnés fit la connaissance d'Hector et qu'elle dut passer des heures avec lui pour l'aider à rédiger la déclaration de sinistre. En voisin obligeant, Hector se crût obligé de l'aider à trouver un peintre, à vérifier le devis, à suivre les travaux.
Un autre événement vient rompre la routine. Ce soir, Charles se réveille et ne sent pas la présence de sa femme dans le lit. Il appelle une fois, deux fois.... Enfin, la voix d'Agnés lui parvient. Elle lui dit d'une voix faible qu'elle a très mal au crâne, qu'elle prend l'air sur le balcon, que cela lui fait du bien. Rassuré, Charles pose la tête sur l'oreiller et se rendort.
En plein rêves, Charles entend des coups de sonnette, des chocs sur la porte. Machinalement, il regarde le réveil : presque Minuit.
Qui peut bien les réveiller à cette heure tardive ? Minuit, c'est la meilleure heure pour dormir.  "Les" réveiller est faux; "le" réveiller est plus juste car la place de sa femme dans le lit est toujours vide.  C'est d'ailleurs étrange qu'elle ne soit pas encore allé ouvrir ? En tâtonnant, Charles enfile un vêtement et titube jusqu'à la porte.
D'un regard ébahi, Charles contemple tous ces gens réunis sur leur palier. Il reconnaît vaguement quelques voisins, croisés un jour ou l'autre dans l'ascenseur. Un inconnu sort une carte de sa poche et la met devant son nez :
- Police. Puis je vous parler ?
- Bien sûr, s'étonne le maître des lieux en s'effaçant pour le laisser entrer. Dans son émoi, il oublie de fermer la porte, laissant les curieux profiter du spectacle.
- Où est votre femme, demande fermement le commissaire Cherchebien pressé de retourner, lui aussi, dans son lit.
- Je n'en sais rien, balbutie Charles. Tout à l'heure, elle prenait l'air sur le balcon... Moi, je dormais. Vous m'avez réveillé, constate Charles avec une pointe de reproche.
- Puis-je vous poser une question indiscrète ? demande le commissaire en fermant la porte d'entrée.
- Oui, mais... qu'est-ce qui ce passe ? Où est ma femme ?
- D'abord, avez-vous l'habitude de la frapper quand vous faites l'amour ?
- Non, je ne l'ai jamais frappé, elle m'aurait quitté, réfléchit Charles à mi-voix. Et puis, la dernière fois, ça remonte à longtemps.
- La dernière fois ?
- Oh pardon, je réfléchissais. Que cela reste entre nous, je ne l'ai pas touché depuis des semaines.
- Est-ce que votre femme avait un amant ?
- Je pense que je serais le dernier à le savoir, tente de plaisanter Charles maintenant qu'il se réveille. Pourquoi toutes ces questions ?
- Votre femme vient d'être retrouvée sous vos fenêtres.
- Sous nos fenêtres ! Mais, elle n'est pas tombée du balcon au moins, s'inquiète Charles ! Elle se serait tuée !
- C'est peut-être ce qui lui est arrivé. Le plus difficile, si vous dites la vérité, est d'expliquer les marques de coups qu'elle porte. En attendant, je me vois obligé de vous mettre en garde à vue. Vous êtes le principal suspect de ce meurtre.
Quelle nuit affreuse pour Charles. Il lui faut terminer son somme dans une cellule grillagée, comme un singe ! Il est entre un clochard qui se gratte et une personne bizarre qui piaille d'une voix suraiguë.
Aux premières heures de la matinée, Cherchebien reçoit Charles dans son bureau, le fait asseoir et lui offre un café. Méfiant devant tant d'amabilité, Charles regarde où sont les projecteurs, les matraques, les gégénes.
- Non, ne craignez rien, dit Cherchebien en éclatant de rire. Un indice m'a permis de penser que vous étiez innocent. C'est pour cela que je vous ai fait prélever une goutte de sang. Je viens de recevoir le résultat de l'analyse. Pour le moment, vous êtes innocenté..... Ne voulez-vous toujours pas me dire si votre femme a un amant, ou si un homme la poursuit de ses assiduités ?
- J'y ai réfléchi toute la nuit, répond Charles en avalant son café. Je n'ai pas de réponse.
La police fouille tous les appartements au-dessus de l'endroit où Agnés s'est écrasée. Cherchebien tient à terminer rapidement cette enquête, dût-il analyser le sang de tous les hommes qui habitent cet immeuble.
L'indice manquant est vite trouvé. Dans l'appartement du dessus, chez Hector, un policier découvre un fragment de slip de femme.
Au début, Hector nie tout en bloc. Il soutient que ce morceau de tissu a sûrement été laissé par l'une ou l'autre de ses amies, qu'un sous-vêtement trop fragile n'a pas résisté aux préliminaires.
Hector pâlit un peu quand l'infirmier vient lui piquer le doigt pour lui prélever une goutte de sang. L'opération terminée, il plaisante pendant qu'on le reconduit en cellule, disant qu'il n'avait pas d'alcool dans le sang à cette heure de la matinée.
En présence des résultats de l'analyse et de leur signification, Hector s'écroule. Il raconte sa liaison avec Agnés et la fin.
La tache d'eau avait amené Agnés à venir le voir. Ce fait était purement accidentel, comme le fut son attirance pour cette femme délaissée. Ils avaient ensuite passé de longues heures à bavarder. Hector avait souvent manifesté son désir, mais Agnés désirait rester fidèle à son mari. Il se fit de plus en plus pressant, mais en vain.
Ce soir là, Agnés était monté le voir en pleine nuit. Seul avec la femme qu'il désirait, Hector avait perdu le contrôle de ses actes. Il avait saisi les poignets d'Agnés, il avait arraché son sous-vêtement, il avait étouffé ses cris pendant qu'il abusait d'elle.
Agnés n'avait pas arrêté de se débattre, les marques sur son corps l'ont prouvé. Quand l'acte fut terminé, Hector avait relâché son étreinte; Agnés avait voulu en profiter pour s'enfuir. Hector l'a rattrapé, empoigné. La porte fenêtre était ouverte, elle fit un faux mouvement, puis, elle a disparu par l'ouverture en hurlant.
- Je ne voulais pas la tuer, pleure Hector, c'était un accident. Si vous saviez comme c'est horrible quand les cris s'arrêtent, qu'il y a un bruit d'écrasement, puis le silence...
Après avoir signé ses aveux, Hector s'interroge enfin :
- Comment avez-vous pu croire que ce n'est pas son mari qui l'a tué ?
Cherchebien sourit en tapotant la feuille de papier qui trône sur son bureau : le résultat de l'analyse.
- Une tache vous a fait découvrir cette femme, une autre tache vous a fait accuser... Quand elle est tombée, les vêtements défaits, tout le monde pouvait voir qu'elle n'avait plus de sous-vêtements et une petite tache blanche sur sa toison, résultat de votre accouplement. Comme son mari assurait de ne pas avoir de rapport avec elle, j'ai tout de suite pensé à un autre homme. Mari ou amant, l'analyse génétique permettait de confirmer l'identité du coupable.

A  LUNDI

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