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le déclin

Publié le par HITOYUME

Le déclin des budo serait amorcé au Japon, selon les affirmations récentes de plusieurs grands maîtres, à la fin d’un reportage télévisé sur la forge des lames de katana. Lorsque fut abordé l’avenir du bujutsu et du budo, les quatre grands maîtres japonais (âgés) confièrent avec nostalgie : « Le déclin du bujutsu et du budo est amorcé au Japon, parce que nos anciens arts de guerre ne sont pas assez ludiques pour intéresser notre jeunesse », dit l’un.« Les jeunes de maintenant ne sont plus attirés par l’effort physique et ils se désintéressent d’une recherche spirituelle », dit le second. « On peut constater le déclin du budo japonais à ce que les champions de judo et de karate sont plus souvent étrangers que Japonais », dit le troisième. « Les budo survivront, peut-être, grâce au développement des arts martiaux à l’étranger, cependant les étrangers les considèrent en tant que sports plutôt que vestiges d’arts de guerre japonais et l’esprit chevaleresque a disparu », dit le plus âgé.
N’ayant jamais envisagé la possibilité d’un déclin du budo au Japon, j’ai pris mon téléphone pour appeler un ami du Pays du Soleil Levant et j’ai eu confirmation que tous les budo y étaient en déclin. Les plus touchés seraient le kendo et le judo. Tous les styles de karate également, à l’exception (paraît-il) du kyokushinkai, en raison de l’engouement populaire pour les « kakuto gi », qui passent sur la plupart des chaînes japonaises de télévision, et qui sont, sous diverses appellations, des combats plus ou moins sans règles, mais tous à frappes réelles.
Ce que les grands maîtres ne pouvaient pas dire dans le reportage, c’est que le Japon subit une grave crise économique depuis une dizaine d’années. On y est en pleine période de réductions des effectifs. Le chômage augmente. Chacun est poussé à penser « performance », à l’école et au travail, plutôt qu’au budo ou au budo sport. Avec 300 à 400 heures par mois au boulot et souvent 2 à 3 heures de transport par jour, il ne leur reste que 4 ou 5 heures pour dormir. Ils n’ont donc plus le temps ni l’énergie pour s’intéresser à autre chose qu’à leur gagne riz. Ce que les grands maîtres japonais ne savaient pas, c’est que l’étranger pourrait ne pas prendre le relais comme ils l’espéraient. Même en budo sport, certains signes sont inquiétants chez nous. Mais nos fédérations de judo et de karate réagissent. Contrairement à ce qui se passe au Japon, le nombre de jeunes progresse considérablement. Pour eux, ce sont des sports de compétition passionnants, qui sont « plus qu’un sport ». Alors qu’au Japon, il est considéré comme rétrograde de s’intéresser aux « arts guerriers du passé glorieux des samurai », ici, en revanche, les jeunes évoquent les samurai avec admiration.
Néanmoins, il y a une crise du nombre des licences et de leur répartition. Ainsi, la Fédération Française de Judo et Disciplines Associées (F.F.J.D.A.), la troisième fédération sportive de France, avec ses 550 000 licenciés et ses 136 000 ceintures noires, était parmi les fédérations sportives françaises les plus médaillées. Les résultats « attristants » (selon le président actuel, Jean Luc Rougé) du judo français aux J.O . d’Athènes auraient annulé l’effet « Douillet » … qui aurait été l’arbre qui cachait la forêt (au conditionnel).
Tous les espoirs sont permis. A l’inverse de ses prédécesseurs, Jean Luc Rougé est un ex-grand champion et il entend redresser la barre afin de retrouver les 650 000 licenciés d’il y a quelques années.
Il ne faut pas dramatiser. La F.F.J.D.A. n’est pas la première des Fédérations sportives à subir une « traversée du désert ». N’empêche que … Une fédération étant une association fédérant des associations, le nombre des licenciés donne le pouls du sport qu’elle représente. Et lorsque le nombre des licenciés diminue, il est légitime de s’inquiéter.
J’ai appris récemment, qu’une « commission de réflexion » de la F.F.J.D.A. s’était réunie afin d’étudier les raisons de la baisse des licences de judo. Est-elle ponctuelle ? Va-t-elle se poursuivre ? Nul ne le sait, mais la commission de réflexion … « réflexionne ». Faut-il rendre le judo plus sportif et plus spectaculaire ou retourner au « judo traditionnel » ? That is the question. « O » optera probablement pour le judo sport à tout va, puisque c’est le seul moyen pour séduire les jeunes. Mes « grandes oreilles » m’avaient dit qu’il en était de même dans la fédération de karate et celles des « Arts de la main » similaires. Je me suis donc renseigné. Francis Didier, le président de la F.F.K.A.M.A., un champion de karate très titré a, chiffres à l’appui, prouvé que le karate était en progression. Le nombre des jeunes licenciés augmente et ils montrent une ardeur telle et une qualité technique si étonnante que … ça va faire mal ! En revanche, il est exact que les adultes ne représentent actuellement que le tiers des licences.
« Les » karate étant de plus en plus sportifs, les abandons des adultes sont à l’image de tous les sports. Ils raccrochent leur keikogi vers les 25-30 ans … lorsque la vitalité de jeunesse commence à faiblir. Et c’est cela qui me désole. C’est à eux que je destine d’ordinaire mes écrits, mais elles intéressent beaucoup plus les jeunes, leur aînés n’ayant pas le courage de remettre en question leurs « certitudes ». Les jeunes semblent plus lucides. Même s’ils sont tombés dans le chaudron du « budo sport de championnats », ils ont raison de s’intéresser à ce qu’il y a « au-dessus », à l’art martial véritable, le combat réel total de survie, sans règles (dit « kakuto bujutsu »). En s’y intéressant dès l’adolescence, ils iront probablement « plus haut » à l’âge où d’ordinaire les budoka sportifs raccrochent.
Dans mes écrits, je dis sans cesse qu’il est dommage qu’un budoka abandonne au moment précis où il pourrait devenir fabuleusement efficace en dépassant les bornes du budo populaire. Ce n’est pas parce que la vitalité de jeunesse diminue et que l’on se sent dépassé dans les randori ou les jyu gumite « respectant les règles de compétition » qu’il faut jeter l’éponge. Vous avez peut-être tiqué sur le G de jyu gumite. On écrit effectivement, souvent, jyu kumite, mais il est plus correct d’écrire jyu gumite. En japonais, le K devient G dans un mot composé, ainsi kumite devient gumite, keri devient « mae geri ». En tant qu’étrangers, nous pouvons continuer d’écrire jyu kumite mais ce n’est pas « politiquement correct ».
Si le budo est « plus qu’un sport » c’est surtout parce qu’il donne la possibilité de progresser en passant à « l’art martial véritable », qui apporte l’efficacité « sublime ».
Cependant, à mon sens, le passage par « l’art martial sportif » est indispensable pour débuter « l’art martial véritable ». Ce passage apporte une certaine expérience du combat conventionnel … et il n’est pas négligeable d’en connaître les « faiblesses ».
Il est déraisonnable de vouloir (par autosatisfaction) sauter cette étape. Il est toujours déraisonnable, dans quelque domaine que ce soit, de vouloir prendre un raccourci. D’autant que l’on ne peut rien faire seul en art martial, il faut s’exercer avec des partenaires et on ne peut en trouver de valables que dans un dojo de budo.
Derrière « l’art martial sportif » il y a « l’art guerrier véritable » et dans ce dernier, qu’il soit Oriental ou Occidental, le paradoxe est que plus on prend de l’âge, plus on s’y passionne, plus on progresse et on devient efficace.
Lorsque les championnats de karate furent décidés, les karateka d’esprit guerrier, disons kakuto karateka japonais, estimèrent déshonorant d’y participer, du fait que le championnat développe l’ego à bon compte (les techniques les plus dangereuses, donc les plus efficaces, ayant été abandonnées). Pour ces « guerriers », l’art du combat pour sauver sa vie n’est pas un jeu et en combat ultime, sans règles, les chances de survie sont minimes si l’on ne supprime pas l’ego. Il n’est plus question de « styles », on est seul face à son destin.
Lorsque furent adoptées les catégories de poids en karate sportif, ce fut le mépris. C’était reconnaître l’insuffisance du karate sport par rapport à « l’art guerrier de la main de Chine » véritable. Je suis d’accord, mais je n’irai pas jusqu’au mépris. Bien au contraire, j’en suis ravi. Pourquoi ? Je vais vous le dire.
Il est certain et indiscutable que les championnats du budo sportif avec catégories de poids ont favorisé l’essor du judo et « des karate. Mais adopter des catégories de poids en karate sportif, c’était donner la preuve de son infériorité par rapport au karate guerrier. C’était reconnaître « officiellement » qu’un petit n’aurait aucune chance de survivre s’il était attaqué par un plus grand. Et ça, c’est faux. En karate guerrier, un petit léger est à égalité de chances avec un grand lourd. L’art de la main comprend des moyens de compenser toute infériorité physique.
En judo guerrier, le petit léger est également à égalité de chances avec un grand lourd. Nous en avons eu la preuve avec les victoires « faciles » de petits judoka dans les « combats libres sans règles ». Les membres de la famille Gracie l’ont prouvé. Ils disent pratiquer du « ju jutsu Brésilien » mais ont été initiés, par papa Gracie, au judo « complet » des années 1890, celui du judo Kano où tout était permis, coups y compris. Cependant, en judo sportif « épuré de tout ce qui peut être dangereux », tous les judoka savent qu’ils ne font pas le poids (si je peux dire) dans un randori ou un shiai, lorsqu’ils sont entre les mains d’un grand lourd et qu’ils « jouent le jeu ». D’où l’adoption des catégories de poids en championnat réglementés, à l’instar des championnats de lutte, le judo étant devenu « une forme de lutte avec kimono ».
Le karate sport a un autre inconvénient, plus grave encore cette fois, par rapport au karate guerrier. Celui d’augmenter le complexe d’infériorité qui touche tous les petits légers. Evidemment, les catégories de poids aident les petits à frimer du haut de leurs trois pommes, en se disant « champions » sans préciser, bien sûr, dans quelle catégorie de poids. Mais ils sont plus complexés encore, parce que l’on ne peut pas tromper l’inconscient, ni la vérité intérieure.
Or, en karate guerrier c’est l’inverse. Ce « guerrier de poche » jubile intérieurement en se disant « toi mon vieux, tu vas avoir des surprises si tu m’attaques ! » et, peu à peu, la peur et le complexe d’infériorité disparaissent. Les répercussions sont alors grandes dans la vie professionnelle et familiale.
C’est pourquoi, je ne le répéterai jamais assez, il me semble (amicalement) stupide, d’en rester aux deux tiers du premier niveau de « l’art de la main de Chine ». Se faire plaisir en pratiquant le karate sport, pourquoi pas ? mais sans oublier de s’exercer aussi au karate guerrier, c’est élémentaire pour survivre. Ceci dit … vous m’avez compris.

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T
Cela fait un moment que le Japon connait des difficultés économiques, et la catastrophe récente n' a pas arrangé les choses !<br /> La jeunesse est prise par le modernisme virtuel !<br /> Mais le combat, celui sans règle, reste toujours de mise
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