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histoires a suivre

Jean BART le héros de Dunkerque (4)

Publié le par HITOYUME

Jean Bart
"Le Héros de Dunkerque"
04

RESUME : Corneille Bart, marin de Dunkerque, s'est engagé comme corsaire sous le commandement du vieil Ange Crop. Il laisse chez lui sa femme et ses deux fils : Corneille, l'aîné, et Jean, le cadet...

Entretemps, la famille habitant la maisonnette de la rue de l'Arbre, s'était élargie; un petit frère était né : Jacques; puis deux petites soeurs. L'aînée, Catherine, s'accrochait déjà aux jupes de sa mère, tandis que la cadette sommeillait dans son berceau. Jacquot l'endormait en la cajolant pendant que sa maman faisait la lessive. Quant à Jean, il se rendait utile là où il le pouvait. Il appréciait l'ordinaire du marin et du pêcheur : le hareng frais ou saur, la morue salée ou la plie, le poisson fumé gonflé d'huile ou les tendres filets séchés de la sole. Dans ses sorties, il emportait un morceau de pain rassis et des biscuits secs qu'il grignotait tout en se promenant en plein vent.
Quand son père rentrait au port, il écoutait avec ravissement ses histoires glorieuses de courses le long des côtes anglaises ou hollandaises, pleines de navires éperonnés, de mâts abattus et de voiles déchiquetées, de luttes à la hache, au pistolet, à l'épée, au couteau, de combats en corps-à-corps, de bombes éclatant avec un bruit de tonnerre... Des histoires à faire frémir ! Mais Jean ne frémissait pas. Il aimait les entendre. Pendant les vacances, il jouait au combat naval dans la rue, à la plage ou sur la place de la Chapelle. Avantagé par sa forte taille, il refpoulait aisément tous ses assaillants, les étendait sur le pont ou les balançait par dessus bord. Son sang généreux l'emportait toujours : ce sang indomptable de marin qui circulait dans ses veines.
A l'âge de huit ans, Jean connut la guerre réelle, tant sur mer que sur terre. Il fut le petit spectateur d'une rencontre grandiose dont le souvenir resta gravé dans son âme d'enfant.
Le père n'était pas reparti. Le bruit courait que les Anglais allaient bloquer Dunkerque par mer, tandis que les Français tenteraient de conquérie la ville par terre. Le maréchal Turenne venait de prendre Mardijck quand la flotte anglaise apparut devant le port. L'hiver était rigoureux; le gel immobilisait les navires en rade. Corneille pensa qu'il valait mieux laisser passer l'orage avant de sortir de sa coquille. Au printemps de l'année 1658, les forces en présence se mirent sérieusement à la besogne. Jean et son père erraient par les rues, en quête de nouvelles. Partout on préparait la ville à une défense désespérée. Turenne approchait. Dunkerque inonda d'eau de la mer le pays qui s'étend jusqu'aux Moëres. Mais Turenne contourna l'inoindation et atteignit les dunes entre Dunkerque et Zuidschoote. du haut de sa tour, le guetteur annonça qu'une armée espagnole se portait au secours des assiégés. Tous les hommes valides furent mobilisés pour la défense. Le commandant de la place avait bien envie de tenter une sortie mais avec les vingt-cinq vaisseaux de guerre de ces satanés Anglais qui tenaient la cité en alerte, c'était impossible !
De la place de la Chapelle, où il avait livré naguère tant de compbats, Jean apercevait la plage hérissée de barricades. Tout le long du rivage, des barques et des chaloupes armées étaient amarrées. corneille déclara un beau soir que le maréchal français avait achevé l'encerclement de la ville.
"Nous voilà dans de beaux draps ! soupira-t-il".
Deux mois s'écoulèrent.
Une fois Jean put accompagner le guetteur au haut de la tour. Il le lui avait demandé si gentiment que l'homme n'avait pu refuser. Corneille venait d'être affecté à la défense des remparts. Par une meurtrière, Jean vit une dizaine de navires anglais longer la côte en direction de Nieuport... Brusquement un fracas de tonnerre secoua les dunes. L'artillerie marine bombardait le flanc de l'armée de Don Juan d'Autriche. le bruit de la canonnade emplit la ville et les alentours. Du côté de la mer,  l'assaut des remparts se déclencha, tandis que la bataille faisait rage dans les dunes. La poussée se maintint toute la journée. Le soir on ramena le père  Corneille chez lui, une balle dans les reins.
- Une blessure à ne pas oublier, dit-il à Jean. Tu la feras payer cher au moment opportun !
La bataille des dunes tournant à leur désavantage, les Espagnols se retirèrent en direction des Furnes. Dunkerque se rendit. Quelques heures plus tard, la ville était remise aux partisans de Cromwell, ceci en exécution des accords conclus avant le début du siège. l'appui anglais s'est toujours monnayé...
Jean Bart devint ainsi, le même jour, citoyen de trois grandes puissances : l'Espagne, la France et l'Angleterre. Il s'éveilla le matin comme Flamand espagnol, s'assit à table à midi comme Français et entendit le soir son père se lamenter d'être devenu Anglais.
A l'époque, on ne supportait pas l'Anglais. Il était l'ennemi du pays et du peuple, l'implacable adversaire de tous les marins dunkerquois. On n'ignorait pas qu'Albion voulait détruire les corsaires. Pour elle, l'occupation de Dunkerque était le moyen rêvé de mettre son projet à réalisation. l'occupant fit de la ville une place forte. Les corsaires s'enfuirent vers l'Espagne ou la Hollande. Après sa guérison, Corneille reprit son métier de pêcheur. hélas, le commerce allait mal. Il fallait manger du pain sec. mais mieux vaut manger du pain sec que de mourir de faim.
Un jour, jean fut le témoin d'un incident qui devait marquer son coeur d'une empreinte indélébile. Maman Bart, les yeux remplis de larmes, emballait dans un grand sac de toile, les vêtements de marins et les cirés, ainsi qu'une provision de victuailles. Comme une âme en peine, le père errait d'une pièce à l'autre. Une fois son baluchon fermé et déposé dans un coin de la salle, Bart revêtit son costume de cérémonie : le pantalon de drap gros-bleu, la veste bleue par-dessus un tricot de laine, et l'écharpe de soie autour du cou. Pourquoi embrassa-t-il si fort Catherine ? Pourquoi ses paroles ressemblaient-elles à des sanglots ?
- Il fallait que cela arrive ! disait-il. Mais cette séparation ne sera pas éternelle. Alex Jacobsen a pu me procurer un bon engagement dans un port hollandais. Bientôt, tu me reverras. veille sur les petits. Moi, je me charge du reste.
Corneille souleva ses enfants un à un. Quand il tint Jean à bout de bras, il resta un instant immobile et reagarda son gamin préféré dans les yeux.
- Jean, ton père en est réduit à s'engager à l'étranger. c'est dur. Je veux que tu sois plus tard un marin plus heureux que moi. J'ai connu le reflux. Essaie de profiter du flux !
Corneille mit son baluchon sur l'épaule. Il traça le signe de la croix sur le front de chacun, puis s'en alla. Jean vit que sa mère, du seuil de la porte, agitait une main en signe d'adieu, tandis que de l'autre elle passait son tablier sur ses yeux embués de larmes. Il l'entendit qui criait au père :
- Dieu te garde, Corneille !
Le lendemain, Catherine conduisit tous ses enfants à la petite chapelle où un grand cierge était allumé devant la statuette de la Sainte Vierge...
La vie aventureuse du père se poursuivit loin de Dunkerque pendant des années. Parfois, après une absence de plusieurs mois, sa haute silhouette se dressait dans le chambranle de la porte, puis disparaissait dans la brume, deux ou trois jours plus tard, aussi soudainement qu'elle était apparue...

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