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les enquetes de gustave cherchebien

de l'argent dans un coffre

Publié le par HITOYUME

 

Gustave CHERCHEBIEN

 

L'homme au chapeau de feutre s'enfonça dans l'ombre d'un porche. Un agent passait, les bras derrière le dos, nonchalant et calme... Lorsqu'il eut tourné le coin de la rue, l'homme sortit du trou noir où il s'était dissimulé et avança à pas de loup vers la petite porte métallique. De sa poche il sortit  un instrument, tripota un instant à la serrure...
La porte s'ouvrit sans bruit. L'homme se glissa dans le passage étroit, suintant d'humidité, déboucha dans une cour...
Au fond de la cour, une sorte de hangar bas, coiffé de tôle, et un bureau attenant. La lumière jaune d'un réverbère de la rue, parvenant par-dessus une palissade, illuminait chichement cette scène.
Au loin, une sirène de bateau poussa un hululement plaintif. Le fracas du trafic sur l'autoroute était assourdi par la distance...
L'homme, sans hésitation, pénétra dans le petit bureau. Il pressa le bouton de sa torche électrique...
Quelques papiers épars sur une table...
Un calendrier illustré au mur... Sans intérêt pour lui. Il cherchait l'argent.
Il était passé par là une semaine auparavant, en plein jour. Il était venu livrer de la bière. L'homme dans le bureau, un petit gros, bedonnant, la nuque grasse roulant sur son col de celluloïd, un bout de de cigare mâchonné au coin de la lippe, l'avait éconduit une fois sa livraison terminée:
- Fiche-moi le camp, maintenant ! On vous a assez vu ici...
Puis il avait tourné les talons, était rentré dans le bureau... 
Mais le livreur de bière s'était caché dans un coin de la cour et avait attendu...
Le soir venu, il avait épié le petit gros et son aide : grand, maigre, en bras de chemise. Ils discutaient dans le bureau avec animation. A un moment donné, le grand maigre enfila son veston, prit une serviette, et le petit gros ouvrit le coffre-fort vétuste, dans un coin de la pièce...
Des liasses de billets ! Il y en avait pour des millions, dans ce coffre-fort !
Eric Candoli, plus connu sous le nom de Sid l'Ecraseur, livreur de bière pendant le jour et cambrioleur la nuit, rêvait de cet argent depuis huit jours. Il avait tout préparé avec soin. Il avait relevé le plan du quartier, étudié les heures des rondes de police et les habitudes des occupants du petit bureau...
Ce soir, il aurait l'argent.
Sid l'Ecraseur s'approcha du coffre-fort, sortit de sa poche un cylindre brun de la taille d'une sucette... De la gélignite. A l'aide d'un peu de papier gomme, l'homme adapta l'explosif près de la serrure du coffre, appliqua une motte de pâte plastique sur le tout, laissant dépasser la mèche... Il alluma, puis attendit.
L'explosion fit trembler les vitres mal enchâssées. La terre plastique vola dans tous les coins de la pièce, mais toute la puissance de la détonation se porta là où il y avait le plus de résistance : sur la porte du coffre. Délogée de ses gonds, elle s'entrebâillait maintenant sur les trésors...
Un bruit métallique dans la cour fit sursanter Eric Candoli. Avait-on entendu l'explosion ?
A pas de chat, il alla se placer derrière la porte, le coeur battant.
Il était pourtant certain que de la grande bâtisse donnant sur la cour personne n'avait pu entendre la détonation. Il savait qu'il n'y avait là que des bureaux que tous les occupants quittaient le soir venu. Pas même un veilleur de nuit...
Prudemment, Eric risqua un oeil à travers la vitre sale...
Rien qu'un chat famélique explorant les poubelles. Pas de danger...
A gestes rapides, Eric ouvrit un sac de toile, s'approcha du coffre, rafla les liasses de billets éparpillés par le choc, et quelque monnaie qui traînait...
Il disparut dans la nuit, son butin sous le bras.
A peine était-il parti d'un quart d'heure que deux hommes essouflés pénétraient dans la cour : un petit homme grassouillet, à la nuque croulante de graisse, et un long individu maigre, les poings enfoncés dans les poches de son imperméable miteux.
- Tu es sûr qu'on ne nous a pas suivis ?
- Sûr et certain... Mais je me demande s'ils n'ont pas déjà notre adresse.
- De toute façon, faudra faire vite. Ils peuvent arriver d'un moment à l'autre...
Les deux hommes pénétrèrent dans le petit hangar où ils travaillaient toute la journée. Il y régnait une odeur d'encre d'imprimerie et d'acide, et la lumière piteuse de l'ampoule dont le grand maigre venait de tourner l'interrupteur révélait un atelier en désordre, avec une petite presse dans un coin, des tables de marbre encombrées de rouleaux, de boîtes d'encre de couleur...
Les deux hommes ne perdirent pas de temps. Ils prirent des plaques de zinc gravées en creux et les plongèrent dans des bacs d'acide. Puis ils s'emparèrent d'une pile de feuilles de papier blanc dans un coin, et tandis que le petit gros les déchirait une à une, l'autre les roulait en boule, les entassait dans un vieux poêle à charbon, y mettait le feu.
La porte s'ouvrit alors toute grande, et Gustave Cherchebien s'y encadra. Il fit, bonhomme :
- Trop tard, les enfants... Inutile d'essayer de détruire les pièces à conviction.
Les deux hommes, penauds, se relevèrent, tendirent mollement le poignet aux menottes que leur passèrent deux autres agents sortis de l'ombre et partirent sans même savoir que leur coffre avait été pillé...
Eric Candoli, allias Sid l'Ecraseur, est aujourd'hui en prison. Il n'a pas encore compris pourquoi on l'accuse d'avoir tenté d'écouler de la fausse monnaie et d'être le complice de deux imprimeurs sans scrupule...

A  LUNDI

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